La Rotonde
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Archive for octobre 28th, 2014

À surveiller – Les Veillées dans l’arrondissement de Beauport

Image des Veillées de Code Universel
La compagnie de danse Code Universel présentera du 26 octobre au 9 novembre son projet artistique Les Veillées dans l’arrondissement historique de Beauport. Pour réaliser ce projet, Code Universel profitera de la collaboration de la compagnie Hendrick Van der Zee (HVDZ), venue spécialement de France pour l’occasion. Avec Les Veillées, les deux compagnies aspirent à tisser une relation entre l’art et la population.

« À l’occasion des Veillées, l’art va se déployer au site patrimonial de Beauport, dans un contexte de proximité favorisant les découvertes. Ce projet permet à des créateurs d’ici et de la France d’échanger leur savoir-faire, mais aussi d’intervenir dans la vie quotidienne des gens afin de l’enrichir par des rencontres artistiques qui portent l’empreinte de la créativité. La population pourra vivre une expérience unique qui met en lumière le caractère rassembleur de la danse », a affirmé Mme Hélène David, ministre de la Culture et des Communications et ministre responsable de la Protection et de la Promotion de la langue française.

Que ce soit en discutant de musique, d’architecture, de photo ou de danse, Code Universel souhaite aller à la rencontre du citoyen afin de l’écouter et d’échanger sur la présence et sa perception de l’art et de la culture dans sa vie. « La rencontre entre l’art et la culture se fait au quotidien, sans qu’on ne le réalise, explique M. Daniel Bélanger, directeur général et artistique de Code Universel. Nous voulons sensibiliser et responsabiliser les gens à s’approprier leur culture. » Les Veillées cherchent donc à impliquer le citoyen par plusieurs rencontres et activités qui permettront aux artistes de Code Universel et HVDZ de créer un film-spectacle. Ces activités seront, par exemple :

· Le pas-de-porte sur les avenues Royale et des Cascades : Portrait vidéo des citoyens devant leur porte pour en faire une galerie des citoyens – Dimanche 26 et vendredi 31 octobre

· Intervention dansée : Le public devient, pour un instant, chorégraphe en donnant des indications aux danseurs professionnels. Il devient alors témoin d’une œuvre qui prend vie sous ses yeux – Mardi 28 octobre à l’Oasis Centre femmes

· Danse dans la ville : Arpenter le Vieux-Beauport avec les danseurs et évoluer dans des lieux symboliques – Jeudi 30 octobre

· Lectures publiques et danses dans l’autobus 800 : Lecture de textes politiques et d’anecdotes en lien avec le quartier et son histoire – Les mercredis 29 octobre et 5 novembre

· Atelier d’éveil à la danse auprès de petits – Mardi 4 novembre

À la suite de ces rencontres, un spectacle sera construit autour des perceptions et interactions avec les citoyens de Beauport. Présenté à trois occasions les 8 et 9 novembre à la salle communautaire du Centre Monseigneur-De Laval, ce film-spectacle se voudra une superposition de plusieurs formes d’art et sera réalisé par huit artistes de Code Universel et de HVDZ.

C’est en cherchant à mettre le citoyen au cœur de la culture que la Ville de Québec et le ministère de la Culture et des Communications ont été séduits par le projet artistique original de HVDZ. En créant Les Veillées en 2003, un projet présenté dans plusieurs villes du monde, le directeur artistique Guy Alloucherie a su favoriser les rencontres entre la population et les artistes et a pu créer un espace de cocréation. La Ville s’est tournée vers la compagnie québécoise Code Universel pour adapter le concept français des Veillées aux couleurs du Vieux-Beauport. Ce projet est réalisé grâce au soutien de l’Entente de développement culturel intervenue entre le ministère de la Culture et des Communications et la Ville de Québec.

Pour Mme Marie-France Trudel, présidente de l’arrondissement, ces événements culturels sont l’occasion de mettre en lumière les particularités et le dynamisme du milieu : « Nous sommes fiers d’y participer et de partager cette richesse avec tous les amateurs d’art ».

« La Ville de Québec est fière de s’associer à cet événement rassembleur qui témoigne de l’effervescence culturelle qui se déploie sur l’ensemble des secteurs de la ville depuis quelques années.», indique Mme Julie Lemieux, vice-présidente du comité exécutif, responsable de la culture, du patrimoine et de l’aménagement du territoire. « Les différentes activités proposées profiteront du cadre exceptionnel de l’arrondissement historique de Beauport pour stimuler l’esprit créatif et novateur des citoyens. »

Chroniques du regard 2014-2015, no 2 – Danse K par K, Danse de garçons par Karine Ledoyen

danse-de-garcons-danse-k-par-k-photo-david-cannon-8Présenté au Théâtre Le Périscope, Danse de garçons est la reprise d’un spectacle présenté avec grand succès par le Carrefour International de Théâtre de Québec en 2013.  Le titre est tout à fait descriptif. Il y a de la danse (les amateurs ne seront pas déçus) et il y a des garçons. Ils sont sept, ils sont intenses, ils sont sincères dans leurs démarches et leurs corps sont totalement investis dans le mouvement.

C’est pour vous si vous aimez les organisations ludiques et la dépense d’énergie faite sans retenue, ainsi que les interprètes sur scène qui incarnent leurs propres personnages, c’est-à-dire des humains dans leur réalité (qui se rencontrent, s’apprivoisent ou se confrontent les uns les autres).

C’est pour vous si vous voulez voir, dans un nouveau cadre, une flopée de jeunes comédiens talentueux qui ne parlent ici « qu’avec leurs corps ».

Les garçons, c’est qui ? Ce sont six comédiens actifs sur les différentes scènes actuelles (Charles-Étienne Beaulne, Jean-Michel Girouard, Éliot Laprise, Jocelyn Paré, Jocelyn Pelletier et Lucien Ratio), tous sortis du conservatoire d’art dramatique de Québec entre 2005 et 2011, auxquels s’ajoute Fabien Piché, danseur professionnel diplômé de L’École de danse de Québec en 2010.

Danse de garçons, c’est quoi ? C’est une série de jeu et de joutes qui se succèdent pendant presqu’une heure. Dans des actions parfois proches de la performance, les scènes se développent en alternant les aspects ludiques et explosifs, voire épiques et fantastiques de la représentation théâtrale. Les échanges entre les interprètes se font parfois à sept, parfois en plus petits groupes, mais servent toujours de base à une rencontre complice entre individus. « Cela démarre avec une séance de réchauffement remplie de testostérone et du simple plaisir d’amplifier la masse de son corps vers l’épuisement. Cela glisse et roule et se frappe et s’accroche comme des électrons fous qui remplissent la fosse. » Source: Alain-Martin Richard, Jeu.

On y retrouve « … des courses folles, des relais énigmatiques, des jeux d’adresse, des luttes et des rixes où la sueur coule à flots, les muscles se tendent et les corps se crispent et se palpent ne nous laissent aucun répit. » Source: Josianne Desloges, Le Soleil

La scénographie est très efficace. D’abord présenté comme une pile de bois, de vrais madriers sont manipulés de différentes manières par les interprètes. Parfois éléments de décor, parfois accessoires, ces lourds bouts de bois demandent un effort physique véritable pour être bougés ou transportés et les dangers dans leurs manipulations sont réels. Dans une alternance de tableaux lents ou plus explosifs, ils deviendront indices de territoire à habiter ou de limites à ne pas franchir, symboles d’armes ou véritables supports pour des mouvements d’équilibre. Ils serviront, tout au long du spectacle, à définir le décor, transformable et modulable, selon les différentes scènes. « S’ils aiment construire, ils prennent également un malin plaisir à détruire, à créer le chaos. Faisant office de décor, les madriers font un boucan d’enfer, se révèlent lourds, demandent une bonne force physique pour les déplacer. Le danger de se blesser est bien réel. Les interprètes souhaitaient un engagement fort, une vraie mise en danger. Ici, rien de métaphorique : une grosse planche de bois sur la tête, ça fait mal ! Le parcours du spectacle suit le parcours du bois, qui devient tour à tour radeau, patinoire, route, langue, labyrinthe, chemin de croix… » extrait du Cahier pédagogique accompagnant le spectacle.

Petit historique des hommes qui dansent

De tout temps, dans tous les pays et dans toutes les civilisations, les hommes ont dansé entre eux (sans les femmes!). On retrouve des danses chamaniques utilisées pour différents types de cérémonies (Kecak dans le film Baraka) et des danses pour entraîner les soldats (la pyrrhique de la Grèce antique) et les préparer à la guerre, autant chez certains amérindiens que chez les soufis turcs. On retrouve des danses qui ont fait office d’instruments de socialisation pouvant aider la noblesse dans son insertion à la cour  et, dès le XVIIe siècle, on retrouve des danseurs de ballet qui sont professionnels dans leur pratique. Les rôles de ces derniers ont évolué passant, à travers les âges, d’interprètes de rôles féminins à « porteurs de danseuses romantiques » pour redevenir danseur étoile dans toute sa légitimité, comme Guillaume Côté. Cette légitimité du danseur vedette est d’ailleurs célébrée lors de gala comme “Kings of Dance”.

D’autre part, on retrouve des danses créées pour être interprétées par les hommes entre eux, comme dans les lupanars argentins à la fin du XIXe siècle (voir un extrait de film où Valentino et Nijinski dansent un tango) ou directement dans les rues de Brooklyn dans les années 1960-70: le break dance et le hip-hop, qui continuent d’évoluer).

Aux États-Unis, Ted Shawn (1891-1972), un des premiers représentants de la danse moderne, a  créé une compagnie exclusivement masculine dont les chorégraphies mettaient de l’avant mouvements athlétiques et thématique « virile », comme dans « Kinetic Molpai » (1935). Chez nos voisins du sud, on retrouve aussi, maintenant, des programmes universitaires mettant l’accent sur le développement du danseur masculin.

Le spectacle Danse de garçons offre une atmosphère remplie de testostérone et de célébration de la vie dans laquelle on se rapproche d’une recherche d’authenticité et de découverte de soi à travers le mouvement et dans laquelle on s’éloigne des danses traditionnelles et des clichés sur la danse qui persistent malgré tout. Pour les clichés et les manières de les désamorcer, je vous invite à lire le chapitre 7 de Danser : enquête dans les coulisses d’une vocation de Pierre-Emmanuel Sorignet intitulé : « La danse, c’est pour les filles et les pédés ». Pour les stéréotypes du danseur strip-teaseur, il faut voir la bande-annonce de « Magic Mike » et la participation de concurrents à différents concours de popularité télévisés.

Pour terminer, avant de vous inviter une dernière fois à aller voir le spectacle Danse de garçons qui ne sera présenté que quelques jours, je vous recommande l’extrait d’un autre spectacle, créé récemment pour et par de jeunes hommes. Issu d’une autre culture, le spectacle de Radhouane El Meddeb Au temps où les Arabes dansaient…  mélange cabaret, danses traditionnelles et music-hall en proposant un spectacle festif, généreux et ouvert, en forme d’ode à la liberté.