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Soi | Billet d’Olivier Arteau-Gauthier sur Idiom + Ruminant Ruminant

Soi | Billet d’Olivier Arteau-Gauthier sur Idiom + Ruminant Ruminant

23 janvier 2015

ruminant-ruminant_photo-svetla-atanasova2Olivier Arteau-Gauthier nous parle instinctivement de Idiom + Ruminant Ruminant. Voici son billet!


La première fois que j’ai pu admirer son travail comme interprète, c’était dans l’oeuvre chorégraphique de Bernard Meney et Estelle Clareton ; Je ne tomberai pas. Cet interprète, d’une grandeur impressionnante, mettait à profit son charisme et son élégance. Sa précision et sa sensibilité étaient empreint d’une grande virtuosité. Cette fois-ci, Brice Noeser campe le rôle de créateur et nous dévoile son univers déjanté avec humour et humilité. La représentation du soi.

Les mains rivées sur le visage, j’essaie d’intellectualiser les nombreux effets que cette «non-pièce» chorégraphique a fait sur moi. Rien ne va plus, j’y vais instinctivement.

La pièce ouvre sur ces deux interprètes, habillés de façon casual, qui se préparent à nous présenter un extrait saccadé de quatre minutes sur une musique latine. D’entrée de jeu, on sent la contemporanéité de l’interprétation et cette volonté de créer quelque chose d’éphémère et d’actuel. Cependant, l’effet théâtral disparaît rapidement lorsqu’on constate la réelle complicité qu’ils partagent.

«Ça ne parle pas de bovins, ça ne parle pas d’amour […]. Ça parle de tout et de rien.» indique Noeser dans son programme de soirée. Mais à quoi bon «parler» lorsqu’on peut communiquer qu’en existant, aurais-je envie de dire. Tout d’abord, le créateur se présente en nous exposant les objectifs de son spectacle et la recherche qu’il souhaite entreprendre. Divaguant autour d’un discours sans queue ni tête, il parvient d’abord à nous faire rire puis à nous questionner sur l’importance que nous portons au sens d’une oeuvre plutôt qu’à ce qu’elle peut transcender spontanément, sans devoir porter en elle un bagage émotif puissant ou universel.

En se jouant des codes de la représentation, les interprètes s’exposent dans des jeux axés sur l’apprentissage d’un dialogue et de calculs mentaux. Ils jouent, comme des enfants, à des jeux simples, dont on aime observer les comportements. La danse, comme on l’entend, n’est toujours pas intervenue dans le spectacle. Et tant mieux!

Ce danseur, connu pour sa virtuosité, élabore Ruminant Ruminant autour de la création d’un langage, d’un discours entre les interprètes et à cette relation privilégiée public-danseurs. Avec humour et humilité, il crée un dialogue qui s’articule autour de codes connus ; le rire, le rythme, le silence et la maladresse. À quoi bon décortiquer le geste pour en décrypter un sens, lorsqu’on peut faire simplement, avec autant d’humilité.

Que ceux qui aiment la «chorégraphie» s’abstiennent et pour les amoureux de la rencontre, vous serez servis ; ils sauront se livrer à vous.

Sachez que vous aurez également la chance d’assister à Idiom, une oeuvre sur le dialogue entre Jennifer Dallas, une interprète canadienne, et Bienvenue Bazié danseur originaire du Burkina Faso. Ils explorent la rencontre et le métissage des différentes cultures. À voir.