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Petit guide de lecture chorégraphique / Partie 5

S - Flak -José Navas - photo Michael SlobodianÀ vous de jouer

Pour le spectateur qui connait peu la danse contemporaine et qui a peur de s’y perdre, je lui propose un jeu. Celui de prendre le spectacle comme un jeu d’organisation dans lequel il lui sera intéressant de : (1) chercher les reprises d’une même série de mouvements, (2) observer l’effet de ces répétitions dans les différentes orientations spatiales, (3) observer les différences personnelles quand elles sont dansées simultanément par plusieurs interprètes à la fois, (4) observer les séquences de mouvements enchainées à elles-mêmes, ou répétées plusieurs fois par un même danseur, ou intégrées dans un duo ou un trio. Le spectateur peut aussi chercher la reprise d’un mouvement ou d’une section qui a évolué en changeant de rythme.

Le spectateur moins cartésien pourra, de son côté, se laisser porter par l’humanité de la danse et la sensibilité des interprètes. Laisser le chorégraphe et les interprètes tout simplement affirmer, comme le dit Navas en entrevue : «Ceci est mon instrument, c’est ainsi que je suis fait et je vais m’abandonner à travers la structure de cette chorégraphie.»

Petit guide de lecture chorégraphique
Partie 1 : Le travail du chorégraphe
Partie 2 : Collaboration Chorégraphe-Interprètes
Partie 3 : Héritage Cunningham
Partie 4 : Le spectacle S

S - Flak - José Navas - photo Michael Slobodian

 

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Chroniques du regard – Émergences chorégraphiques 2011: Le programme

Ces jeunes créateurs sont fins prêts et piaffent d’impatience de partager leur savoir-faire, leur créativité, leurs folies et passions. J’ai eu la chance de voir certains extraits des œuvres présentées et de parler un peu avec les artistes. Ces jeunes passionnés, que j’ai pu voir évoluer depuis le début de leur formation professionnelle, couvrent différents horizons esthétiques. Dans le cadre de ce projet, ils ont pu profiter d’une période de recherche appréciable ainsi que d’une grande liberté artistique. Leurs œuvres puisent leurs sources autant dans le monde conceptuel que dans la danse beaucoup plus organique.

ÉC 2011 - Intime de Caroline Drolet - Josiane Bernier Annie Gagnon sur la photo de David CannonLe solo Anaïs de Christine Laguë est dansé par elle-même. Délaissant les techniques encodées et les manières génériques de danser, elle y a trouvé une personnalisation dans la manière de bouger. Son personnage scénique allie différents aspects de sa féminité, à travers calme et tempête. Recherche de l’essentiel, sa danse est présentée sous la forme de courtes vignettes qui s’accumulent tout au long de la chorégraphie.

Dans le duo Cycles, Andrée-Anne Giasson amène sur scène deux interprètes devenant déclinaisons d’une même entité. Le contact physique de l’une avec l’autre devient comme un contact avec soi-même, une révélation, le passage d’une créatrice qui se détache de son œuvre. Les interprètes sont animées d’une mélodie gestuelle éthérée et aérienne, qui évolue et se développe en même temps que la relation entre les deux femmes. Architectural.

Pour Intime, Caroline Drolet est partie d’un questionnement et d’une profonde réflexion sur le passé, sur le passage intergénérationnel et les traces laissées aux différents individus. Comment devenir différent de ceux qui nous ont précédés ? La gestuelle du trio provient de la chorégraphe et les mouvements des solos, générés par les interprètes, ont ensuite été transformés par la chorégraphe. Pop-corn et musique un peu Destroy, nostalgie et (non)conformité sont au rendez-vous.

Au début de Torie-Lorie, Jean-François Duke présente en alternance les vies parallèles de deux interprètes qui éventuellement se rejoignent. Prenant comme option l’importance de prendre du temps pour soi, il présente une chorégraphie toute en ombrages et en simplicité, dans une scénographie et un éclairage minimalistes mais extrêmement efficaces. Musique de Fred LeBrasseur.

ÉC 2011 - La Séduction? - Jade Marquis - photo Myriam BastienSTAG 2 de Maryse Damecour ramène sur scène un matériau évolutif, déjà été présenté dans des versions antérieures en diverses occasions. Nous avons ici un énigmatique « solo pour 2 danseurs et une autre interprète ». Étude dans une lumière changeante et carré blanc, au son d’un projecteur, cette chorégraphie explore les relations originelles et fondatrices qui tracent toutes leurs suivantes. Vibrations, oscillations et bruits du silence seront aussi accompagnés par la musique du « Stabat Mater » de Pergolesi

Dans le solo La Séduction?, Jade Marquis propose la triple répétition d’une même séquence, afin de mettre en lumière trois différentes intentions liées à la séduction : la sensualité, la drague et la provocation. Une chorégraphe qui veut susciter la réflexion du spectateur concernant le phénomène d’hypersexualisation de la société. Cette chorégraphie fait partie de l’échange avec Tangente, diffuseur montréalais de danse contemporaine.

 

Librement inspiré de l’événement Danses Buissonnières, développé par le diffuseur Tangente, Émergences chorégraphiques offre une plate-forme professionnelle à une nouvelle génération de chorégraphes et donne lieu à un échange avec l’organisme montréalais. Les jeunes créateurs et interprètes en danse seront en spectacle pour une deuxième année, dans le cadre du programme Première Ovation. Financé par la Ville de Québec, ce programme accorde des bourses aux artistes de la relève et facilite leurs contacts avec les diffuseurs et les institutions culturelles. Près de 200 jeunes artistes participent au festival Relève en capitale solidement appuyé par un budget plus de 200 000 $.

 

EC 2011 - Christine Laguë - photo Patrick Matte

 

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Chroniques du regard – Émergences chorégraphiques 2011: Une variété de courtes œuvres

ÉC 2011 - Torie-Lorie de Jean-François Duke - Ève Rousseau-Cyr sur la photo de Valérie Lacasse

Une aubaine pour les curieux et les néophytes, un régal pour les connaisseurs, les spectacles de ce genre sont une excellente occasion de première approche pour les non-initiés à la danse contemporaine. En présentant une variété de courtes œuvres différentes, ils peuvent donner une vision élargie des multiples manifestations possibles de cette forme d’art assez méconnue du grand public, tout en présentant concrètement les valeurs actuelles du milieu. Pour les subventionneurs, les participants et le public, ils permettent de concrétiser une vision nouvelle, des orientations et des stratégies mises en actions afin d’encourager la relève, lui donner les moyens adéquats pour réaliser leurs premières œuvres et les amener vers le public.

 

Émergences chorégraphiques 2011 - STAG 2 - Maryse Damecour - photo Renaud PhilippeQu’ils soient à un point ou à un autre de la chaine de production, dans ce que l’on nomme l’écologie du milieu, les participants aux milieux artistiques des diverses disciplines participent maintenant à une synergie visant, entre autres, une organisation accrue et un appui véritable pour les nouveaux arrivants sur le marché professionnel. Pour les jeunes artistes de la danse, c’est une chance énorme et une nouveauté que d’avoir ces moyens à leurs portées. Ils peuvent ici profiter d’une vague leur permettant d’excellentes conditions de financement, de création, de présentation et de réseautage, dans des actions concrètes qui favorisent le développement et la diversification des publics pour la danse à Québec.

 

EC 2011 - Cycles - Andrée-Anne Giasson Marie-Michèle Gagnon Tessier - photo Émilie DumaisLa création du « pôle Québec »

 

Un fourmillement d’activités issues des différentes disciplines artistiques sera présenté par Relève en Capitale. Les spectacles de danse inclus dans cette effervescence annuelle participent à la création du « pôle Québec » dans le monde de la danse. Quand on parle de pôles artistiques, on fait référence à différents endroits du territoire (national ou canadien) qui présentent, ou présenteront, une activité substantielle de création-production-diffusion. Chaque pôle possède sa couleur et ses spécificités et un pôle de danse (je sais, l’expression est un peu boiteuse) est en train de s’affirmer dans la ville de Québec. À vous maintenant, cher public, d’assister à l’émergence de ces jeunes artistes aux talents multiples qui deviendront peut-être, en complément aux artistes déjà établis, les forces vives de demain.

 

EC 2011 - Christine Laguë - photo Patrick Matte

 

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Chroniques du regard – Émergences chorégraphiques 2011: L’émergence d’un pôle

Émergences chorégraphiques 2011 - Christine Laguë sur la photo de Patrick MatteLe milieu de la danse de Québec est en ébullition et les membres de cette communauté artistique sont de plus en plus présents sur les différentes scènes de la ville. Depuis quelques années, plusieurs diplômés du programme collégial en interprétation, offert conjointement par L’École de danse de Québec et le Cégep de Sainte-Foy, tentent leurs chances en s’installant ici après leurs études. Parmi ces jeunes professionnels, certains créent leurs propres chorégraphies, pour eux-mêmes ou pour d’autres interprètes. Le spectacle « Émergences chorégraphiques », présenté cinq soirs dans le cadre de l’événement Relève en Capitale, permettra de voir à l’œuvre plusieurs de ces jeunes danseurs, dans une soirée composée de six courtes chorégraphies d’une dizaine de minutes chacune. Malgré l’uniformité apparente que l’on pourrait soupçonner de la part de ces jeunes artistes, tous issus du même programme de formation, ils présentent des profils variés et leurs expertises couvrent plusieurs styles et tendances.

Lors de ces présentations, découvrez leurs plus récents travaux à travers les chorégraphies de Maryse Damecour, Caroline Drolet, Jean-François Duke, Christine Laguë et Andrée-Anne Giasson. En plus des chorégraphes, qui seront parfois sur scène, les interprètes impliqués dans ces projets sont : Josiane Bernier, Alexandrine Côté, Annie Gagnon, Marie-Michèle Gagnon-Tessier, Sonia Montminy, Fabien Piché et Ève Rousseau-Cyr. Le spectacle comprend aussi une danse solo de la montréalaise Jade Marquis.

 

EC 2011 - Christine Laguë - photo Patrick Matte

 

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Les Chroniques du regard – S’envoler

par Mario Veillette

S'envoler - Estelle Clareton - photo Ben PhilippiCette saison de La Rotonde s’amorce avec le spectacle S’envoler de la chorégraphe Estelle Clareton, une danse pour 11 interprètes, basée sur l’idée de la migration et sur certains mouvements observés chez les oiseaux. La chorégraphie présente un groupe serré, aux mouvements désordonnés, dont s’échappent parfois certains individus. Ils partiront pour de courts solos, duos ou trios avant de réintégrer le groupe ou d’être rejoints par lui.

Dans cette chorégraphie sans histoire, mais dans laquelle on peut suivre l’évolution d’un groupe en migration, tout le monde bouge beaucoup, parfois de manière acrobatique et, quoique souvent l’impression laissée est celle d’un groupe en déplacements craintifs, les relations entre les individus s’établissent avec légèreté et plaisir. Chacun arrive à faire ressortir sa propre personnalité et pour ma part (je vous dévoile ici ma porte d’entrée personnelle) je surveillerai particulièrement deux de ces drôles d’oiseaux : Sylvain Lafortune, un ex-collègue universitaire, et Brice Noeser, un ancien étudiant, diplômé de L’École de danse de Québec en 2006.

Sylvain LafortuneSylvain Lafortune est le plus expérimenté des interprètes de S’envoler. Sur scène depuis plus de trente ans, il a été membre de compagnies prestigieuses dont Les Grands Ballets canadiens, Lar Lubovitch Dance Company, O’Vertigo et Montréal danse et a participé à de nombreuses tournées internationales. Danseur polyvalent, il est aussi un enseignant recherché. À 49 ans, ce danseur athlétique carbure toujours à la dépense physique et au plaisir de dépenser de l’énergie et, comme il le dit : il « accote encore très bien les jeunes interprètes ». Dans ce projet, il a su intégrer une expertise extraordinaire en portés (qui l’a amené jusqu’aux études doctorales). Ses études et sa vie familiale l’ont désormais fait bifurquer vers le statut d’interprète pigiste. Ce qui lui permet de choisir avec plus de parcimonie les projets dans lesquels il s’investit et c’est avec plaisir qu’il a plongé dès le départ dans l’aventure proposée par Estelle Clareton. Au cours des trois résidences de création, il a pu, avec la chorégraphe et les interprètes, partager les imaginaires, les expériences, les perceptions et idées qui ont mené à la cohérence du projet. Sylvain a surtout prisé le processus de travail détendu, mené par une chorégraphe dont il apprécie l’imaginaire, l’humanité et l’humour.

Brice NoeserDans le spectacle, je surveillerai aussi Brice Noeser, un ancien étudiant que j’ai le plaisir de voir évoluer professionnellement depuis sa diplomation de L’EDQ en 2006. Brice commence à avoir une feuille de route impressionnante, en tant qu’interprète et aussi comme chorégraphe. Remarquable autant par sa capacité de gestuelle très désarticulée que par sa grande taille et sa physionomie unique, il a été invité à se joindre à l’aventure de S’envoler lors de la troisième résidence de création, quand est venu le temps de déconstruire et de « salir la gestuelle », la rendre moins carrée et linéaire, mais encore plus originale et personnalisée par chacun. À partir de sa propre expérience, Brice a très bien compris les thèmes d’exils et de migration artistiques, géographiques et identitaires à la base du projet. Il a aussi pu très bien s’intégrer dans ce groupe d’individus disparates, tant au niveau de l’âge, des expériences et des personnalités.

Pour terminer, je confirme ce qui a été dit ailleurs : S’envoler est « un spectacle de danse idéal, autant pour celui qui connaît la danse contemporaine que pour celui qui découvre » (Corinne Laberge, janvier 2011). Venir assister en salle au spectacle S’envoler vous permettra de suivre avec une attention particulière deux interprètes que vous connaissez déjà un peu mieux, sans oublier tous les autres, dont Alexandre Parenteau, qui évolue régulièrement, ici à Québec, dans les projets de la compagnie « Le fils d’Adrien danse ».

Voir la biographie de Mario Veillette
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Mario Veillette nouveau collaborateur aux Chroniques du regard de La Rotonde

Mario VeilletteDans cette nouvelle série d’articles, je vous accompagnerai tout au long de la saison 2011-2012. Parfois pour mettre un spectacle en contexte, en y situant les courants esthétiques, artistiques ou sociaux particulièrement actifs. Parfois j’irai de façon plus instinctive en dévoilant mes coups de cœur ou mes pistes personnelles. Parfois, j’irai aussi à la manière d’un billet d’humeur.

Je n’essaierai pas de vous expliquer en mots les danses et les spectacles car, s’il est une chose essentielle qu’il faut affirmer encore une fois, c’est que la danse est une expérience sensible/émotive/artistique qu’il vaut mieux faire en direct, avec les artistes directement devant soi, c’est-à-dire en assistant aux spectacles, dans leurs lieux de diffusion.

Un spectacle de danse peut souvent avoir des effets magiques sur les spectateurs tout en dévoilant les intérêts esthétiques, artistiques, psychologiques ou sociologiques de ses créateurs et interprètes, mais il est avant tout expérience. Une expérience dont le spectateur peut ressortir étonné, changé, enrichi, …
Sortir de chez soi pour assister à un spectacle de danse contemporaine, avec toute l’organisation et l’investissement que cela implique, peut devenir ardu. J’espère, avec mes billets, pouvoir vous tendre des perches efficaces, vous donner des ports d’accès accessibles pour les différents spectacles de cette saison, qui s’annonce riche en découvertes tous azimuts.

J’espère vous donner le goût de venir rencontrer des gens passionnés qui ont choisi un mode d’expression allant bien au-delà des mots.

Voir la biographie de Mario Veillette